Les infirmières praticiennes jouent un rôle essentiel dans l’écosystème de santé canadien. Comme les médecins, elles peuvent poser des diagnostics, prescrire des médicaments et gérer des problèmes de santé. Dans cette entrevue, Amra Dizdarevic, infirmière praticienne dans une Clinique TELUS Santé, nous présente son quotidien, nous explique ce qui l’a poussée à choisir cette profession et nous donne son opinion sur la télémédecine.
Pourquoi avez-vous choisi les soins infirmiers?
Je suis venue au Canada en tant que réfugiée d’un pays déchiré par la guerre, la Bosnie-Herzégovine, où j’ai vu beaucoup de souffrance humaine. J’avais 13 ans lorsque la guerre a commencé, et j’ai vu le rôle indispensable qu’ont joué les médecins et les infirmières lors de cette période. Cela m’a laissé avec une impression indélébile et a orienté mon choix de carrière.
À quoi ressemble votre travail d’infirmière praticienne?
En tant qu’infirmière praticienne dans nos cliniques, je fournis des soins de santé primaires complets à des familles. J’établis le diagnostic des maladies courantes et prévisibles, pour lesquelles je fournis aussi le traitement. De plus, je commande des tests en laboratoire et des examens d’imagerie diagnostique (radiographies, échographies, imagerie par résonance magnétique) et j’interprète les résultats obtenus, je prescris des médicaments et je dirige les patients vers des spécialistes au besoin.
La promotion de la santé et la prévention des maladies et des blessures jouent également un rôle important dans ma pratique. Même si les infirmières praticiennes travaillent de manière autonome et indépendante, elles collaborent avec d’autres cliniciens, comme des médecins, des diététistes, des kinésiologues et des psychologues, ce qui enrichit l’exercice de notre profession. Je fournis des soins à des personnes de tous les âges, mais la majorité de mes patients sont des enfants, des adolescents et de jeunes adultes.
À quoi ressemble une journée de travail typique pour vous?
Chaque journée est différente, et cette variété me plaît beaucoup. Je peux commencer la journée en voyant un nouveau-né pour sa première évaluation et son premier examen physique après le congé de l’hôpital, puis recevoir ensuite un enfant plus âgé pour son évaluation annuelle complète et son examen de croissance.
Entre mes rendez-vous planifiés, il se peut que je passe quelques appels pour vérifier la guérison d’une blessure ou pour communiquer les résultats de tests à des patients. Beaucoup de nos patients nous posent des questions par courriel sur divers sujets comme la COVID-19 ou le temps d’écran recommandé pour leurs enfants. Alors je passe normalement une bonne partie de mes moments libres entre les rendez-vous avec des patients à répondre aux courriels que je reçois.
Ensuite, il se peut que je tienne une consultation virtuelle avec un adolescent que je traite pour des symptômes d’anxiété et de dépression ou un TDAH. J’ai effectué un mini stage en psychopharmacologie pédiatrique. J’ai donc acquis des compétences supplémentaires et développé une confiance qui me permettent de gérer des problèmes de santé mentale communs. J’ai observé une augmentation des problèmes de santé mentale depuis le début de la pandémie. Dans une période où l’accès à des psychologues et à des conseillers est limité en raison de la demande accrue, il est particulièrement important de prendre le temps de fournir des conseils et du soutien.
Mon travail est intéressant, car je ne sais jamais ce qui m’attend lors du prochain rendez-vous. Avant la pandémie, je donnais des vaccins et des consultations en santé-voyage, et c’est un aspect de mon travail qui me manque énormément. La collaboration entre collègues me plaît beaucoup. Parfois, je dois communiquer avec un diététiste à propos d’un patient qui présente des signes de trouble alimentaire, ou encore, je tiens une séance d’information pour les autres membres du personnel infirmier dans le but d’enrichir leur pratique.
Que préférez-vous de votre travail?
Ce que je préfère de mon travail est assurément les liens significatifs que je tisse avec mes patients. Chaque personne a sa propre histoire et ses besoins uniques. Au lieu de me concentrer sur mes propres préoccupations et moyens pour corriger la situation, j’écoute leur histoire pour comprendre leurs objectifs et priorités concernant la santé, et je les aide à les atteindre. Cela permet de créer des liens solides et sincères et d’établir un partenariat significatif où nous travaillons ensemble pour améliorer leur santé. Je me concentre sur des soins personnalisés et adaptés aux besoins de mes patients. Je crois en l’importance de la continuité des soins en établissant une relation continue avec mes patients. Les soins personnalisés et la continuité des soins peuvent tous deux mener à de meilleurs résultats pour la santé des patients.
Selon vous, en quoi les soins de santé virtuels sont-ils avantageux pour les patients canadiens?
Les soins de santé virtuels améliorent les soins fournis, mais aussi l’accès à ces soins. Ils sont devenus indispensables depuis l’apparition de la COVID-19, plus particulièrement au début de la pandémie. En effet, ils ont permis aux Canadiens d’avoir accès à des soins de santé à partir de leur demeure et de réduire leurs visites à l’urgence et à l’hôpital – ce qui a permis aux professionnels de la santé de se concentrer sur les patients qui avaient besoin de soins urgents et de diminuer les risques de transmission de la COVID-19 dans le milieu des soins en personne.
Avant la pandémie, je fournissais des soins par téléphone et par courriel au besoin, mais maintenant, j’utilise aussi les appels vidéo pour apporter des soins à mes patients. Les soins de santé virtuels améliorent l’accès aux soins. Par exemple, un jeune adulte aux prises avec de l’anxiété qui est au milieu de ses examens de fin de session pourrait être trop stressé et pressé pour se rendre à un rendez-vous en personne. Cependant, il sera probablement très ouvert à une rencontre par appel vidéo, pendant laquelle je pourrai évaluer son humeur, son affect et l’évolution de sa médication, en plus de lui fournir du soutien. Les soins de santé virtuels permettent également de diminuer les coûts, les déplacements et le temps passé dans la salle d’attente. Récemment, j’ai lu une étude qui démontrait que les soins de santé virtuels pouvaient aussi être bénéfiques pour l’environnement, principalement en raison de la réduction des émissions associées au transport1. J’espère donc que nous continuerons d’intégrer de nombreux aspects de la télémédecine à notre pratique, même après la pandémie.
1 Future Healthcare Journal: « Does telemedicine reduce the carbon footprint of healthcare? A systematic review. » https://www.rcpjournals.org/content/futurehosp/8/1/e85