En manque d'énergie?

Par Dre Diane McIntosh, chef des neurosciences de TELUS

Avec l’hiver et les restrictions relatives à la COVID-19 qui traînent en longueur, et à l’occasion du premier anniversaire de la pandémie, nous sommes nombreux à tirer de la patte, fatigués et sérieusement appauvris en matière de joie de vivre.

Si vous avez le moral et la motivation dans les chaussettes, si vous recherchez un exutoire à votre apathie, si le bon vivant que vous êtes habituellement ne vit plus que de bonbons, incapable de composer un repas sain, il est temps de prendre un nouveau départ.

Avant de vous suggérer des moyens d’y parvenir, j’aimerais vous parler de la science qui se cache sous la motivation. Je suis d’avis que le fait de comprendre la science qui sous-tend un enjeu est profitable – comme si on nous confiait les rênes de notre propre cerveau – et aide à prendre les mesures pour engendrer un véritable changement durable.

La science de la motivation

La motivation est alimentée par la dopamine, un neurotransmetteur, et par l’interrelation entre notre cerveau reptilien et les fonctions exécutives. Le cerveau reptilien, aussi appelé cerveau triunique, est le siège de nos émotions. Il prend le dessus quand nous avons peur et assure notre sécurité en déclenchant notre réaction de combat ou de fuite. Les fonctions exécutives ont lieu dans le cortex préfrontal. Il nous aide à organiser, à planifier, à prévoir et à réfléchir à nos actions de façon critique.

La dopamine est un messager chimique (neurotransmetteur) essentiel à de nombreuses activités cognitives, dont la motivation, l’attention et la planification, et elle est déterminante dans notre capacité à ressentir du plaisir. Elle est présente en abondance à la fois dans le cerveau reptilien et dans la zone responsable des fonctions exécutives lorsque la motivation est au rendez-vous et que nous cherchons à offrir un bon rendement. Cependant, en cas de stress élevé et chronique, comme pendant une pandémie mondiale qui se prolonge, le cerveau reptilien peut être envahi d’une si grande dose de dopamine, qu’elle peut vider le réservoir de la zone exécutive. Le cerveau reptilien prend alors le dessus sur la zone exécutive, ce qui génère de l’anxiété.

De plus, plutôt que de nous aider à organiser, à planifier et à atteindre nos objectifs, un faible taux de dopamine dans le cortex préfrontal nous rend démotivés, apathiques, voire drainés émotionnellement ou raplapla (incapables de ressentir la joie ou la déprime).

Une autre zone importante du cerveau qui a une incidence sur la motivation est le système de récompense ou de renforcement, dont le nom scientifique de noyau accumbens est peu avenant. Quand nous pensons à quelque chose d’agréable, le taux de dopamine augmente, ce qui nous incite à l’action. Si nous pensons être récompensés, nous sommes plus susceptibles de passer à l’action, car le rôle de la dopamine est de nous inciter à agir, parfois pour obtenir une récompense, parfois pour éviter une expérience négative.

Si nous croyons qu’une tâche ou une activité sera difficile, ou que la récompense pour l’avoir accomplie ne vaudra pas l’effort déployé, notre motivation sera faible. De la même façon, si l’activité requiert de nous une augmentation soudaine de l’effort à fournir, particulièrement quand la motivation est déjà peu élevée, elle risque de nous la plomber. Il est pourtant possible de reprendre les commandes de votre cerveau reptilien pour stimuler votre motivation.

Comment pouvez-vous donc retrouver votre entrain quand il semble vous avoir déserté? Ou pour les plus férus de science parmi nous, comment stimuler à nouveau votre production de dopamine?

Les clés du succès

Le cerveau adore l’afflux de dopamine associé à l’anticipation d’une récompense. Il est possible de créer autour de vous un environnement propice à la production de dopamine, qui vous permettra de bouger à nouveau et d’améliorer votre productivité.

On crée des expériences susceptibles de nous récompenser en les planifiant, en particulier en se fixant des objectifs modestes, progressifs, mais réalisables. Chaque fois que vous atteignez un objectif, vous produisez de la dopamine comme mécanisme de renforcement de votre réussite. En d’autres mots, mieux vous réussissez, plus votre cerveau vous motive à réussir.

Une étude récente nous montre qu’une détermination axée sur les résultats (le fait de concentrer l’attention sur le sentiment d’accomplissement à venir) a une incidence réelle sur la stimulation de la motivation.

Établissez un ordre de priorités : Dressez une liste des objectifs que vous voulez atteindre et décidez ce qui figurera en tête de liste. Divisez l’objectif prioritaire en petites étapes réalisables. Créez un « micro-échéancier », en déterminant un objectif à atteindre chaque jour.

Voici des exemples de ce qui pourrait constituer votre objectif initial :

  • Planifier des repas nutritifs susceptibles d’améliorer votre niveau d’énergie et votre moral
  • Désencombrer votre maison : un espace bien rangé peut améliorer le sommeil, stimuler la productivité et réduire le stress
  • Planifier un voyage en famille – peu importe combien de temps à l’avance, la planification de vos vacances de rêve post-pandémie peut vous redonner le sourire

Si ma priorité est d’intégrer des aliments sains à mon alimentation, je peux y aller par petites bouchées :

  • Jour 1 : Demander l’aide d’un professionnel. Demander à mon médecin de famille de me recommander une diététiste, obtenir du soutien par les services de soins de santé virtuels ou obtenir gratuitement des conseils sur la nutrition par l’entremise d’un Programme d’aide aux employés et à leur famille
  • Jour 2 et 3 : Lire sur les régimes alimentaires sains sur des sites réputés
  • Jour 4 : Selon ce que j’ai appris, je peux déterminer les recommandations qui me conviennent, afin de les communiquer à la diététiste, pour m’assurer qu’elles sont conformes à un régime sain et équilibré
  • Jours 5 à 11 : Tenir un journal alimentaire, en y consignant tout ce que je mange chaque jour pendant une semaine, afin d’en discuter avec la diététiste
  • Jour 12 : Rendez-vous avec la diététiste

Faire un peu plus d'exercice physique augmentera également votre taux de dopamine et contribuera à améliorer votre motivation. Une séance de marche rapide de 30 minutes, cinq jours par semaine, suffit pour avoir un effet réel et positif sur le cerveau. Peu importe si vous n’avez pas fait grand-chose (ou rien du tout) au cours des derniers mois. Commencez par vous fixer un objectif de 10 minutes de marche quotidienne et, une fois que vous aurez atteint cet objectif, passez à 20 minutes.

À de rares exceptions près, personne ne regrette jamais une petite marche rapide, mais le plus difficile est de sortir de chez soi. Encore une fois, procédez par petites étapes : je vais simplement me chausser, je vais aller dehors, mais je peux rentrer à l’intérieur si je veux, je vais marcher cinq minutes... En un rien de temps, vous avez votre première séance de marche à votre actif! Félicitations!

Ensemble, nous saurons traverser cette épreuve

Il est important de célébrer les victoires, petites ou grandes, à la maison comme au travail. Le fait de sentir que vous progressez et que vous améliorez votre situation stimule la production de dopamine et augmente les chances de vous pousser à l’action et vers la réussite. Chaque réussite engendre une réponse dopaminergique accrue, ce qui accroît votre capacité future à atteindre vos buts et à réussir.

Partagez vos succès avec vos collègues ou vos proches afin de susciter des réactions positives, une récompense qui stimule davantage la dopamine. Tant que vous y êtes, soutenez et célébrez les succès de vos coéquipiers, des membres de votre famille et de vos amis, car le fait de soutenir les autres a également une incidence positive sur la dopamine.

Et souvenez-vous, il n’y a rien de mal à ne pas se sentir bien. Récemment, dans un balado TELUS Talks avec Tamara Taggart, j’ai parlé des symptômes fréquents de la dépression et des meilleurs moyens d’obtenir de l’aide. Si vous croyez que quelque chose ne va pas, n’hésitez pas à consulter un professionnel de la santé.

Je vous souhaite des jours plus radieux (vivement l’heure d’été!) et le retour de notre dynamisme collectif.

Diane