Ce que nous avons retenu du sommet du Globe and Mail sur les pénuries de médicaments

 

La COVID-19 a posé de nombreux défis – mais même avant la pandémie, le Canada connaissait déjà une pénurie de médicaments, comme les EpiPen. Ces enjeux d’approvisionnement complexes créent des problèmes dans l’ensemble du système de santé et ont des répercussions sur les professionnels de la santé et les patients.

Alors, que peut-on faire pour y remédier? Cette question était au cœur du plus récent sommet en ligne organisé par le Globe and Mail. Pour ceux qui n’ont pas pu y assister ou qui souhaitent simplement obtenir un sommaire de ce dont il a été question, nous avons résumé les principaux points à retenir ci-dessous. Lisez la suite pour savoir ce que les panélistes avaient à dire. 

Les patients sont les premiers à ressentir les effets.

La Dre Jacalyn Duffin, professeure émérite et titulaire de la chaire d’étude Hannah en histoire de la médecine à l’Université Queen’s, a expliqué que les pénuries touchent différents médicaments à des moments différents pour des raisons différentes.

Pour certains médicaments, comme  l’hydroxychloroquine, une demande accrue est responsable de la pénurie. Il peut également être parfois difficile d’obtenir des matières premières au-delà des frontières. Quelle que soit la situation, ces pénuries peuvent avoir une incidence sur les traitements de « presque toutes les classes de maladies que l’on puisse imaginer », a déclaré la Dre Duffin. 

Par exemple, la pénurie d’hydroxychloroquine a directement touché Jillian Kuchard, une bénévole de la Société de l’arthrite, qui dépend de ce médicament pour maîtriser sa polyarthrite rhumatoïde. « Sans ce médicament, mon quotidien est complètement bouleversé, ma vie est chamboulée. Ma capacité à me déplacer et à faire de l’exercice, notamment, dépend réellement des médicaments que je prends », a-t-elle déclaré.

Kuchard a précisé que son pharmacien avait fait des pieds et des mains pour s’assurer qu’elle ait suffisamment d’hydroxychloroquine en dépit de la pénurie, mais, évoquant l’impact sur les patients, elle a dit que l’expérience avait été traumatisante.

Les médecins et les pharmaciens peuvent faire les premiers pas.

Christina Tulk, pharmacienne-propriétaire et présidente de l’Association des pharmaciens du Canada, a relativisé ce travail acharné des pharmaciens. Elle a déclaré que la gestion des pénuries de médicaments peut occuper jusqu’à 20 % de sa journée, ce qui était aussi le cas avant la pandémie. 

Tulk préconise vivement l’élargissement du champ d’exercice des pharmaciens pour leur permettre de faire des substitutions thérapeutiques – une pratique qui est autorisée dans certaines provinces seulement. Elle a toutefois souligné que les pénuries de médicaments peuvent avoir un effet domino où, en remplaçant le médicament A manquant par le médicament B, les pharmaciens pourraient provoquer une pénurie du médicament B.

« Ce problème est de dimension mondiale, et met en cause de nombreux aspects de la chaîne d’approvisionnement », a reconnu le Dr Rakesh Patel, professeur adjoint de médecine et directeur du programme de soins intensifs pour adultes à l’Université d’Ottawa. Il a néanmoins souligné que les médecins peuvent, eux aussi, contribuer à atténuer les conséquences des pénuries de médicaments. « La seule chose sur laquelle nous avons un réel contrôle à l’hôpital, c’est vraiment la gestion de la demande, et c’est cette approche que nous avons adoptée au cours des 10 à 12 dernières années. Ainsi, les médecins prescripteurs s’efforcent de déterminer, par ordre de priorité, qui a véritablement besoin du médicament en pénurie », a-t-il expliqué.

Nous pouvons travailler ensemble pour trouver une solution.

Parallèlement, dans le but de mieux gérer les chaînes d’approvisionnement, Angelique Berg, vice-présidente principale, Mobilisation des parties prenantes pour l’Association canadienne de la gestion de l’approvisionnement pharmaceutique, a déclaré que pour chaque cause de pénurie de médicaments invoquée par la Dre Duffin, il existe six fois plus de solutions.

« Il est d’une importance capitale de reconnaître les réalités de notre marché aujourd’hui, a-t-elle ajouté. Comme la majorité de nos médicaments sont fabriqués à l’étranger, leur contrôle nous échappe, si bien que le marché décline une partie de la responsabilité à cet égard. Le ciel ne nous tombera pas forcément sur la tête, mais il nous faut planifier, coordonner et anticiper judicieusement nos besoins et prévoir les tendances du marché pour pouvoir tirer le meilleur parti de notre place sur la scène mondiale. »

Quels sont les points forts du Canada? « Nous excellons dans les premières étapes de la recherche, et certaines de nos grandes entreprises d’intelligence artificielle s’efforcent d’identifier des molécules qui ont de meilleures chances de parvenir jusqu’au patient », a suggéré Richard Gold, professeur à la chaire James McGill de la faculté de droit de l’Université McGill. Pour exploiter nos atouts, il souhaiterait que le gouvernement fédéral repère plus activement les domaines comme celui-ci et y investisse, de sorte que les organisations universitaires et industrielles de même que les regroupements de patients puissent collaborer plus efficacement pour améliorer l’approvisionnement en médicaments.

La Dre Durhane Wong-Rieger, présidente et directrice générale de la Canadian Organization for Rare Disorders, a également souligné l’importance des partenariats, notamment avec les provinces, le gouvernement fédéral, les régimes privés d’assurance médicaments, les hôpitaux, les patients et les entreprises pharmaceutiques.

« Il faut que ce soit une mobilisation concertée où chacun s’assure de la convergence de nos efforts; ainsi, le bon médicament pourra être administré au bon patient, d’une manière qui sera la plus efficace possible pour le système, et pas seulement au meilleur prix », a-t-elle insisté.

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