Compte tenu de nouveaux traitements contre la COVID-19 à l’horizon, du nombre croissant d’options biosimilaires disponibles et des nouveaux médicaments coûteux en voie de commercialisation, les payeurs privés doivent prendre dès maintenant des décisions clés concernant leurs régimes d’assurance-médicaments afin de s’assurer qu’ils atteignent leurs objectifs, servent leurs adhérents et restent viables.
Au printemps 2021, la Canada Vie a commandité une série de webinaires sur les sujets suivants : 1) les répercussions de la COVID-19 sur les régimes d’assurance-médicaments de Canada Vie sur une période de 12 mois; 2) les médicaments biologiques et biosimilaires au Canada et la façon dont ils sont gérés dans les régimes d’assurance-médicaments publics et privés; 3) la façon de s’assurer que les médicaments offrent un bon rapport qualité-prix grâce à l’analyse coût-efficacité et 4) l’utilisation de décisions fondées sur des données probantes pour le développement de régimes d’assurance-médicaments dans le milieu des payeurs privés.
Les webinaires ont été animés par les expertes suivantes :
La COVID-19 a eu une incidence sur les régimes d’assurance-médicaments canadiens et a mené à une augmentation des prescriptions ainsi qu’à une hausse des demandes de remboursement des médicaments contre l’anxiété et la dépression. De plus, avec des centaines de nouveaux vaccins et traitements médicamenteux en cours de commercialisation, l’incidence de ces nouveaux traitements pourrait être ressentie par les payeurs privés dans les années à venir.
Bien que la COVID-19 soit de mieux en mieux maîtrisée, les payeurs privés pourraient ressentir longtemps les répercussions de la pandémie sur les régimes privés d’assurance-médicaments.
Les coûts des médicaments des payeurs privés ont augmenté de 5,2 % de 2019 à 2020, malgré une baisse de 7,8 % du nombre de demandeurs, indique Mme Martinez. De plus, le coût émotionnel de la pandémie a entraîné une hausse de la consommation de médicaments. En effet, 21 % des adhérents aux régimes privés prennent des médicaments pour gérer l’anxiété ou la dépression, alors que cette proportion était de 19 % avant la pandémie. Source: Le document IQVIA: mars 2021
Mme Martinez explique qu’actuellement, les vaccins pour prévenir la COVID-19 sont payés par les payeurs publics et que les médicaments pour traiter la COVID-19 ne sont approuvés par Santé Canada que pour une utilisation dans les hôpitaux (ce qui les rend inadmissibles aux régimes privés d’assurance-médicaments). Cependant, si l’un des 52 nouveaux vaccins en cours de développement dans le monde est approuvé au Canada, ces nouveaux vaccins seront-ils payés par les payeurs publics? En outre, l’approbation par Santé Canada de l’un des 375 médicaments en développement dans le monde pour le traitement de la COVID-19 en dehors des hôpitaux pourrait avoir des répercussions financières sur les régimes d’assurance-médicaments. C’est un sujet que nous suivons de près, a-t-elle déclaré.
Avant même que la pandémie ne frappe en mars 2020, il y avait un débat actif concernant le passage de la couverture des membres de la marque nominale aux médicaments biosimilaires au Canada et sur la façon de gérer les dépenses en médicaments biologiques dans les régimes d’assurance-médicaments publics et privés.
Les promoteurs de régimes d’assurance-médicaments doivent examiner attentivement diverses approches de la gestion des coûts des médicaments. L’une d’entre elles consiste à remplacer les médicaments biologiques originaux par des biosimilaires, qui sont des médicaments biologiques similaires aux médicaments biologiques coûteux, mais non identiques. Ils sont aussi souvent des milliers de dollars moins chers.
Selon Mme Martinez, la Colombie-Britannique et l’Alberta ont connu beaucoup de succès avec les biosimilaires. Leur expérience montre que des économies peuvent être réalisées lorsque les biosimilaires sont obligatoires pour les nouveaux patients et les patients existants, mais elle recommande néanmoins aux promoteurs d’être prudents lorsqu’ils envisagent de passer à une couverture biosimilaire.
Pour les patients naïfs, c’est-à-dire ceux qui n’ont jamais pris le médicament biologique, la prise d’un biosimilaire devrait être assez simple. Mais pour les patients qui ont pris un produit biologique princeps qui leur convient, le passage à un biosimilaire peut être difficile à vendre », dit-elle. « Il devient difficile d’approcher cette personne et de changer sa couverture de médicaments sur la base de critères de coûts », affirme Mme Martinez. « Sa réaction pourrait ne pas être favorable. »
Par conséquent, la plupart des assureurs adoptent une approche prudente lorsqu’ils envisagent de changer de couverture et le font en même temps que les régimes publics, ce qui permet de mettre en place un parcours public et privé cohérent qui aide les médecins et les membres à passer aux biosimilaires.
Mme Martinez laisse également entendre que les assureurs peuvent adopter de nombreuses approches concernant les biosimilaires, par exemple :
Nous devons savoir nous adapter et utiliser de multiples approches pour trouver un équilibre entre la gestion financière immédiate et la viabilité à plus long terme, sans jamais perdre de vue l’importance des résultats en matière de santé des membres du régime, déclare Mme Martinez.
Bien qu’il s’agisse d’une pratique relativement nouvelle pour les payeurs privés, l’intégration d’une analyse coût-efficacité dans le processus décisionnel gagne en popularité.
Une analyse coût-efficacité ne consiste pas seulement à relever les médicaments les moins coûteux, précise Mme O’Reilly : il s’agit de comprendre la différence entre le coût et la rentabilité, ce qui est l’un des principaux avantages que les données pharmacoéconomiques apportent au remboursement des médicaments et à la prise de décision concernant les listes de médicaments remboursés. « Un médicament peut être coûteux, mais il peut être rentable », dit-elle.
L’ajout de médicaments dont le coût est élevé peut avoir des répercussions néfastes sur un régime d’assurance-médicaments privé. « Comme de plus en plus de médicaments aux prix élevés apparaissent sur le marché, le défi pour les employeurs est de savoir ce qu’ils peuvent se permettre, comment garantir l’accès de leurs membres à un régime complet et ce que ces derniers veulent réellement et ce qu’ils apprécient », dit-elle.
Mme O’Reilly précise que les payeurs privés doivent se poser des questions sur les médicaments comme :
Les évaluations des répercussions financières ne prennent en compte que les coûts – cette analyse ne mesure pas la valeur. Toutefois, selon Mme O’Reilly, l’analyse coût-efficacité compare à la fois les coûts et les avantages d’au moins deux traitements. « Les questions que nous posons sont les suivantes : quelle solution produit les meilleurs résultats par rapport à l’argent qui a été investi? et : les avantages accrus du nouveau médicament valent-ils l’augmentation du coût? ».
Selon Mme O’Reilly, le résultat d’une analyse coût-efficacité est un simple ratio : différence de coûts (coûts associés à l’utilisation des médicaments)/différence dans les effets (années de vie gagnées, années de vie ajustées sur la qualité). C’est ce qu’on appelle le rapport coût-efficacité différentiel (RCED). Plus le RCED est faible, plus l’intervention est considérée comme rentable.
Dans d’autres domaines, les payeurs privés peuvent bénéficier d’une certaine compensation des coûts, notamment la réduction des problèmes de santé prolongés, l’amélioration de la productivité, la réduction de l’absentéisme et la réduction de l’invalidité.
Selon Mme O’Reilly, en raison du prix élevé des médicaments, il est difficile pour les promoteurs de régimes d’offrir un régime complet aux membres de leur régime, et la prise de décisions concernant le remboursement peut être difficile. C’est là que l’analyse coût-efficacité peut être utile. Cette analyse permet de cerner les traitements qui présentent un bon rapport qualité-prix et peut donc contribuer à la mise en place d’un régime d’assurance-médicaments fondé sur des données probantes et sur la valeur.
La gestion active du régime d’assurance-médicaments est essentielle à la viabilité du régime, dit Mme Currie : la base est un régime d’assurance-médicaments fondé sur des données probantes qui utilise des outils comme l’analyse coût-efficacité pour prendre des décisions intelligentes sur les traitements dans lesquels investir.
« Les nouvelles technologies médicamenteuses sont de plus en plus coûteuses et ces options coûteuses sont utilisées plus souvent », explique Mme Currie. Elle cite le rapport annuel de 2019 du Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés, qui montre que les médicaments à coût élevé ont représenté près de la moitié de toutes les ventes de médicaments brevetés en 2019, soit une augmentation spectaculaire par rapport aux 5 % des ventes de médicaments brevetés en 2006.
Que peuvent faire les payeurs privés pour gérer ces coûts croissants? Le promoteur d’un régime d’assurance-médicaments peut envisager un grand nombre d’anciennes stratégies de réduction des coûts, mais la plupart d’entre elles ne tiennent compte que du coût ou de l’efficacité, et non des deux. Un régime d’assurance-médicaments fondé sur la valeur inclut les traitements qui contribuent à fournir la plus grande valeur, comme l’amélioration de la productivité, la réduction de l’invalidité et les résultats globaux en matière de santé pour les membres. Cette approche permet au promoteur d’un régime d’assurance-médicaments de modifier la trajectoire de ses dépenses en médicaments tout en gardant la santé et le bien-être au cœur des discussions. Bien que tous les traitements ne soient pas forcément couverts par le régime d’assurance-médicaments, les décisions relatives à l’inscription de médicaments peuvent être prises de manière réfléchie, en utilisant les meilleures données disponibles.
Comment un payeur peut-il savoir s’il est prêt pour une solution fondée sur des données probantes? Il doit réfléchir à ce qu’il veut atteindre, selon Mme Currie. Un régime d’assurance-médicaments fondé sur des données probantes peut contribuer à réduire les coûts des médicaments au fil du temps tout en maintenant un large accès à des traitements utiles. Cette approche convient bien aux payeurs qui entreprennent une démarche de réduction des coûts ou dont le régime est axé sur le bien-être.
Selon Mme Currie, il faut tenir compte de toute une série d’informations pour prendre une décision d’inscription fondée sur des données probantes. Un processus d’évaluation critique affine les données et mesure le degré de risque et d’incertitude.
« Les données peuvent éclairer une décision, mais elles ne peuvent pas prendre de décisions à notre place. Nous avons également besoin d’experts expérimentés pour nous aider à naviguer dans les zones grises », déclare Mme Currie. « Les payeurs privés doivent déterminer ce que signifie vraiment la valeur, au-delà des chiffres, pour prendre des décisions équilibrées et spécialisées. »
L’évolution des régimes d’assurance-médicaments fondés sur des données probantes sur le marché privé est une excellente occasion de le faire.