Fait intéressant, le nombre de propriétaires d’animaux de compagnie au Canada a augmenté de près de 20 pour cent depuis le début de la pandémie. Environ 58 pour cent des Canadiens ont un chat, un chien, un poisson, un oiseau ou un autre animal à la maison.
Il y a quelques années, après une période de deuil à la suite du décès de notre chien adoré, un terrier irlandais nommé Sunni, mes enfants ont décidé qu’ils voulaient un chat. Évidemment, ils ont juré qu’ils en prendraient tellement bien soin que leur père et moi ne remarquerions même pas sa présence.
Et voilà que, tous les deux, nous nous occupons maintenant à temps plein de deux chats.
Edgar est noir de jais et il a les oreilles pointues d’une chauve-souris. Ce n’est pas une beauté, mais il est affectueux et il a un cœur d’or. Il suit mon mari comme un chien et il s’épanouit dans la routine. La fenêtre de son bureau doit être ouverte avant 9 h pour lui permettre de surveiller les oiseaux. Il se tient près de la table pour quémander de la viande et du fromage, les yeux plissés pour avoir l’air passif et faire le mignon ou sur le dos pour son interprétation de la loutre abandonnée et affamée.
Chaque soir, Edgar se blottit du côté de mon mari, se cure les ongles (les siens, pas ceux de mon mari) et dort là toute la nuit. Le lendemain, il vient se coller pour son câlin matinal, puis il entame gaiement son train-train quotidien.
Parlons maintenant d’Angus. Comme disent mes enfants, il est plus chat que le plus chat des chats. Arrogant, distant, intouchable, impérial. Angus est une boule orange d’ego et d’attitude. Son poil est propre, duveteux et doux comme tout (imaginez un chinchilla orange). Bien qu’il utilise une litière, il dégage une odeur de parfum raffiné : légèrement florale, délicate comme la rosée.
Grâce à cette odeur, à son exquis pelage orange, à sa queue majestueuse extrêmement fournie et subtilement rayée... Il vous attire. Vous avez envie de le caresser... de le prendre. Mais dès que vous vous approchez, même si vous y allez très doucement, les yeux baissés pour témoigner tout votre respect, Angus vous jauge et conclut rapidement que vous n’êtes pas digne de sa présence et encore moins de toucher son pelage parfait. Il vous jette un regard dédaigneux et se met rapidement hors de votre portée en vous laissant tout malheureux, seul, en manque.
Malgré tout, Edgar et Angus sont des membres importants de ma famille, avec chacun leur personnalité et leurs pathologies, et nous les aimons beaucoup tous les deux.
J’ai la chance de communiquer avec de nombreux membres de l’équipe chaque semaine et pas uniquement pour des réunions d’affaires. Nous avons des discussions, des présentations et je fais des publications. Ce rayonnement entraîne souvent de chaleureux messages de gentillesse et d’appréciation, qui comptent énormément pour moi. Il arrive aussi qu’on me demande des conseils ou qu’on me fasse part de frustrations, surtout en lien avec les restrictions souvent déconcertantes qu’engendre la COVID.
Un thème qui a fait surface à plusieurs reprises cette semaine, c’est le pouvoir des animaux de compagnie. De nombreuses preuves scientifiques confirment qu’un animal de compagnie peut se révéler bénéfique pour la santé mentale et le mieux-être. D’un autre côté, pour beaucoup, la perte d’un tel animal est aussi terrible que celle d’un ami intime ou d’un membre de la famille.
Les animaux de compagnie peuvent nous aider à acquérir de la patience et à calmer des nerfs à fleur de peau. Au cours des 14 derniers mois, plusieurs collègues vivant seuls m’ont confié que leur animal de compagnie les avait aidés à traverser la pandémie et à conserver leur équilibre psychologique.
Récemment, une coéquipière m’a dit qu’elle connaissait une dure semaine. Lorsque je lui ai demandé ce qui n’allait pas, elle a répondu : « Tu vas rire de moi » avant de me dire que son chien, qui faisait partie de la famille depuis vingt ans, venait de mourir. Elle m’a dit qu’elle était étonnée de trouver ça aussi difficile.
Je lui ai parlé de ma propre expérience de tristesse à la mort de Sunni, mais je lui ai également dit que je savais bien que certaines personnes ont du mal à comprendre à quel point la perte d’un animal de compagnie peut être douloureuse. Pour certains de mes patients qui n’ont personne d’autre, leur animal de compagnie est leur plus grand et leur plus proche ami, parfois même le seul. Ils m’ont permis de comprendre la douleur que peut causer la perte d’un animal chéri.
J’ai amorcé cette publication en vous parlant de mes chats et en vous disant à quel point cela nous briserait le cœur de perdre l’un d’entre eux. Les récits d’animaux de compagnie que j’ai entendus cette semaine n’ont fait qu’accroître ma gratitude pour leur présence dans nos vies.
Au cours de la dernière année, le monde a connu beaucoup de pertes. Bon nombre d’entre nous en ont personnellement vécu et ils ont fait l’expérience de l’incertitude chronique et de la douleur affective. Que ce soit un animal de compagnie, un conjoint ou un ami qui vous apporte du réconfort, cela importe peu. Ce qui compte, c’est d’établir et d’entretenir des liens émotionnels qui font du bien.
Je crois que de bonnes choses émaneront de cette année difficile. Les leçons tirées de cette expérience commune traumatisante nous permettront certainement de croître. Ce sera d’autant plus facile dans la mesure où nous serons aimables envers nous-mêmes et envers les autres.
Si nous faisons preuve de gentillesse, d’empathie et de compassion les uns envers les autres, même si nous ne sommes pas toujours d’accord en matière de politiques, de vues personnelles ou pour décider si les chats ou les chiens font les meilleurs animaux de compagnie (je vote pour les chiens), cela ouvrira la voie au rétablissement. Nous pourrons ainsi avoir des vies plus productives au travail, plus heureuses à la maison et nos collectivités seront mieux soudées.