Les événements du début de l’année 2025 nous rappellent les nombreux risques et les incertitudes auxquels les régimes de retraite canadiens et leurs promoteurs doivent faire face[1]. En voici quelques exemples :
Il convient de noter que la Banque du Canada a reconnu que les projections figurant dans son Rapport sur la politique monétaire de janvier comportaient plus d’incertitudes que d’habitude en raison du contexte actuel.
Si vous êtes promoteur d’un régime de retraite et que vous vous interrogez sur la façon de réagir aux incertitudes actuelles, voici quatre aspects sur lesquels il est recommandé de se pencher, en plus des facteurs commerciaux plus généraux à prendre en considération :
En 2025, la plupart des promoteurs de régimes de retraite devraient revoir leurs pratiques de gestion des risques liés aux régimes de retraite en fonction des exigences de la nouvelle Ligne directrice sur la gestion des risques à l’intention des administrateurs de régimes (« ligne directrice sur la gestion des risques ») que l’Association canadienne des autorités de surveillance des régimes de retraite (ACOR) a publiée en septembre 2024. Le climat d’incertitude actuel rend d’autant plus pressant le besoin de procéder à l’examen des pratiques de gestion des risques et de combler toute lacune importante mise en évidence par celui-ci.
Lorsque les promoteurs de régimes établissent ou mettent à jour leur cadre de gestion des risques liés aux régimes de retraite afin qu’il soit conforme aux exigences de la ligne directrice sur la gestion des risques, ils doivent également déterminer les risques qui pourraient avoir pris de l’ampleur en raison du contexte actuel. Par exemple, le risque que les exigences de capitalisation minimales requises pour un régime de retraite à prestations déterminées (PD) augmentent de façon considérable à l’avenir peut s’être accru en raison de la possibilité que les marchés financiers connaissent une forte volatilité. Notez que cet examen n’aboutira pas nécessairement à la mise en place de contrôles supplémentaires pour atténuer les risques importants qui ont été déterminés. Ces risques importants peuvent quand même se situer dans les limites de risque établies par le promoteur du régime, et il pourrait donc être suffisant pour ce dernier de quantifier les risques (p. ex., au moyen de simulations de crises) afin de comprendre les conséquences de la concrétisation d’un ou de plusieurs des scénarios de risque. Grâce aux progrès des outils d’évaluation des risques mis à la disposition des promoteurs de régimes et de leurs conseillers, quantifier et surveiller en temps utile de nombreux risques est maintenant beaucoup plus réalisable et efficace.
Un examen des pratiques de gestion des risques d’un régime de retraite PD pourrait révéler qu’il est approprié de réduire les risques. À titre d’exemple, le promoteur du régime peut conclure que la solution idéale consisterait à réduire le risque lié aux placements ou à transférer le risque à une compagnie d’assurance en souscrivant des rentes collectives. Le cas échéant, la bonne nouvelle, c’est que l’atténuation des risques à ce moment-ci pourrait bien être possible puisqu’elle est généralement plus abordable pour un régime bien capitalisé, et la plupart des régimes PD le sont.
Risque du marché pour les régimes de retraite
Pour de nombreux régimes, le climat d’incertitude actuel a probablement accru le risque du marché, c’est-à-dire le risque que le rendement des placements de la caisse de retraite sur le marché soit défavorable. Même s’il faut s’attendre de temps à autre à des périodes présentant un risque du marché élevé, le moment est bien choisi pour les promoteurs de régimes de retraite de vérifier si leur stratégie de placement demeure appropriée, surtout s’ils n’ont pas procédé à un examen de celle-ci récemment.
En ce qui concerne les régimes PD, il peut s’agir de s’assurer que la répartition de l’actif cible demeure adéquate, que le risque de concentration dans la caisse de retraite n’est pas trop élevé, que la caisse de retraite continuera de disposer de suffisamment de liquidités même dans des scénarios extrêmement défavorables, et que l’exposition de celle-ci au risque de change se situe à un niveau acceptable.
Quant aux régimes de retraite à cotisations déterminées (CD), il peut s’agir de s’assurer que l’option de placement par défaut du régime, qui est souvent un fonds à horizon de retraite, demeure la meilleure de sa catégorie et qu’elle convient aux participants au régime. De plus, les types d’options de placement du régime pourraient être revus pour faire en sorte que la gamme de placements donne suffisamment de possibilités de diversification aux participants ayant des profils de risque différents.
Évaluation actuarielle anticipée d’un régime de retraite PD
Les lois sur les régimes de retraite de certains territoires de compétence, comme l’Ontario, autorisent le dépôt d’évaluations actuarielles dont la date d’entrée en vigueur est antérieure à la date requise par la loi en ce qui a trait aux régimes de retraite PD. Les promoteurs de régimes de retraite enregistrés dans l’un de ces territoires de compétence qui ne sont pas tenus de déposer une évaluation en 2025 pourraient envisager de préparer et déposer une évaluation anticipée (p. ex., une évaluation dont la date d’entrée en vigueur est le 31 décembre 2024). Le dépôt d’une évaluation anticipée peut permettre d’établir avec certitude les cotisations au régime de retraite à court terme en se fondant sur une date d’entrée en vigueur de l’évaluation à laquelle le régime se trouvait dans un fort niveau de capitalisation. Cela peut aider à gérer le risque financier du promoteur du régime, et donc lui permettre de financer le régime à long terme, en assurant la stabilité des cotisations en cas de baisse du niveau de capitalisation du régime à court terme causée par un mauvais rendement de l’actif ou par une baisse des taux d’intérêt à long terme survenant en même temps qu’une période difficile du cycle économique.
Avant de décider de préparer et de déposer une évaluation actuarielle anticipée, il est important que le promoteur du régime prenne en considération les avantages et les inconvénients de cette approche, notamment les coûts liés à l’exécution du travail. En outre, la décision de procéder à une évaluation anticipée doit être prise en se demandant si cette démarche est dans l’intérêt supérieur de la sécurité des prestations des participants au régime, ce qui, dans certains cas, peut ne pas être une décision facile à prendre.
Communication aux employés
Les promoteurs de régimes de retraite ne seront pas surpris d’apprendre qu’en raison de la conjoncture, leurs employés sont de plus en plus préoccupés par leur propre santé financière, notamment en ce qui concerne la suffisance et la sécurité de leurs revenus à la retraite. Ce type de préoccupations entraîne souvent des répercussions négatives sur la mobilisation et la fidélisation des employés.
Les promoteurs de régimes de retraite doivent envisager de communiquer avec les employés pour répondre à ces préoccupations. Par exemple, les communications à l’intention des participants à un régime PD pourraient rappeler à ces derniers le fonctionnement d’un tel régime et parler des mécanismes législatifs et de gouvernance qui existent pour réduire la probabilité que leurs prestations soient réduites à l’avenir. Les communications destinées aux participants à un régime CD pourraient rappeler à ces derniers qu’il leur incombe de choisir des options de placement adaptées à leur situation et souligner l’importance de se concentrer sur le long terme lors de la prise de décisions en matière de placement.
Si le promoteur a mis en place un cadre de gestion des risques rigoureux, la communication des principaux éléments de ce cadre devrait rassurer les employés en leur montrant que les risques liés à leur régime sont gérés.
Idéalement, les communications destinées aux employés doivent avoir une portée plus large, en ne parlant pas seulement du régime de retraite, mais aussi des options et des programmes qui leur sont offerts pour améliorer leur bien-être financier global, et du fait qu’un revenu de retraite suffisant et sûr n’est qu’un élément de ce bien-être financier.
Lorsque les promoteurs évaluent les conséquences du climat d’incertitude actuel pour leur régime de retraite, ils doivent toujours tenir compte des répercussions à long terme de leurs décisions et éviter de prendre des mesures fondées sur des considérations à court terme qui pourraient avoir des effets préjudiciables à long terme pour le régime et ses participants.
Toutefois, il n’est pas non plus prudent pour les promoteurs d’ignorer les risques importants à court terme qui pèsent sur leur régime. Il est à noter qu’en raison du fort niveau de capitalisation de beaucoup de régimes de retraite PD, une occasion unique pourrait se présenter en 2025 pour les promoteurs de ces régimes de réduire le risque y étant associé à un coût abordable, remplissant ainsi le double objectif de protéger les régimes contre les risques à court terme qui peuvent être élevés dans la conjoncture et, en même temps, d’améliorer la viabilité des régimes à long terme.
Bien que les éléments à prendre en compte par chaque promoteur de régime de retraite diffèrent en fonction de la situation de son organisation et de son régime de retraite, il est important que tous les promoteurs de régimes évaluent de manière proactive les risques et les occasions que présente cette conjoncture et qu’ils prennent des mesures opportunes le cas échéant.
Cet article a été rédigé par Gavin Benjamin – Associé, Services-conseils de TELUS Santé
[1] Dans le présent article, le terme « promoteur » désigne l’entité responsable de certains mécanismes de surveillance et de certaines mesures en matière de régimes de retraite. Ce terme comprend l’administrateur du régime de retraite dans les cas où ce dernier est l’entité légalement responsable de la surveillance et des mesures.